Neuf mois après la chute de Bachar al-Assad, la Syrie reste en proie à une violence endémique. Plus de 3 000 exécutions extrajudiciaires ont été documentées depuis l’arrivée au pouvoir d’Ahmed al-Charaa, ciblant principalement les minorités alaouite et druze, dans un climat de chaos sécuritaire et d’impunité persistante.
Selon un rapport publié le 7 septembre 2025 par l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), plus de 3 000 exécutions extrajudiciaires ont été perpétrées par les forces de sécurité et les milices affiliées depuis le 8 décembre 2024, date de la destitution de l’ancien président.
Un bilan humain accablant
Entre décembre 2024 et septembre 2025, l’OSDH dénombre 10 672 morts liés aux violences commises par des acteurs locaux et étrangers. Parmi eux figurent 8 180 civils, dont 438 enfants et 620 femmes. Sur ce total, 3 020 personnes ont été exécutées sommairement, dans ce que l’organisation qualifie de campagne « brutale » et systématique.
Le mois de mars 2025 a été particulièrement sanglant : 1 726 exécutions extrajudiciaires ont été recensées, dont environ 1 600 civils alaouites massacrés dans 55 localités des provinces de Lattaquié et Tartous, bastions historiques de la minorité alaouite. Amnesty International a corroboré ces données, diffusant des vidéos vérifiées montrant des exécutions de civils druzes à Soueïda, commises dans des maisons, des hôpitaux et des écoles par des hommes en uniforme.
La violence sectaire comme arme politique
La majorité des victimes appartiennent aux communautés alaouite et druze, systématiquement ciblées par les factions extrémistes qui composent une partie des forces de sécurité de Charaa. Ces groupes considèrent ces minorités comme des « apostats » ou des loyalistes de l’ancien régime. Le Syrian Archive for Justice déplore l’absence totale de poursuites judiciaires et note que les assassinats sectaires se poursuivent presque quotidiennement.
Un climat d’impunité alarmant
Si Ahmed al-Charaa a promis la création d’une « commission indépendante » pour enquêter sur ces meurtres, aucun progrès tangible n’a été observé. L’ONU, la Ligue arabe, les États-Unis et plusieurs capitales occidentales ont condamné ces violences, tandis que le Haut-Commissaire aux droits de l’homme, Volker Türk, a appelé à leur cessation immédiate. Mais la dépendance du nouveau pouvoir vis-à-vis des factions radicales entrave tout processus judiciaire crédible.
Le chaos sécuritaire consécutif à la chute d’Assad alimente une spirale de massacres politiques et sectaires. Des dizaines de Syriens continuent de mourir sous la torture dans des centres de détention gérés par le nouveau régime, ravivant les pratiques les plus sombres de l’ère précédente.
Une transition menacée
La persistance de ces exactions interroge sur la capacité du gouvernement provisoire à incarner une rupture avec l’héritage d’Assad. La découverte de corps abandonnés dans les hôpitaux ou dans les rues, les représailles ciblant des familles entières et l’absence de toute justice traduisent un climat où l’impunité prévaut. À ce jour, la transition syrienne reste prisonnière de ses violences, fragilisant l’espoir d’un avenir plus inclusif et démocratique.